Bataille de montmirail 1814

Dans le cadre de Gene@Event 2020 et de la journée consacrée le 1er octobre à l’histoire napoléonienne, Geneatech nous propose un défi d’écriture pour mettre en avant un des soldats de l’époque napoléonienne de notre généalogie. Voici donc ma participation à ce #DefiNapoleon avec l’histoire de Martial Buge, cultivateur, et fantassin de la Grande Armée.

Martial Buge, fils aîné de Jean, 24 ans, et de Marie David, 21 ans, nait le 23 novembre 1791, à Perpezac-Le-Noir, en Corrèze. Nous sommes en pleine période révolutionnaire et quelques mois plus tôt, le roi Louis XVI et sa famille ont été arrêtés à Varennes alors qu’ils tentaient de quitter la France. Ils sont maintenant détenus à la prison du Temple et dans moins de deux ans, Louis XVI sera guillotiné.

Martial a cinq frères : Jean, est de 3 ans son cadet ; un autre Jean a 7 ans de moins ; Martial, nait en 1801, l’année de ses 10 ans, Pierre en 1804 et enfin, Jean en 1808. Ils grandissent au village de Bouillaguet où leur père est laboureur. Bientôt, Martial et Jean, les aînés, sont assez grands pour garder les bêtes, ramasser du bois ou des châtaignes, et pour aider leur père aux champs.

A 21 ans, le 12 janvier 1813, Martial entre au 16è régiment d’infanterie de ligne. Il se substitut à un autre conscrit d’Uzerche, Pierre Dussua.

Si la possibilité pour un conscrit de se faire remplacer a fait l’objet d’une loi imposant des conditions assez contraignantes en 1802, elle s’assouplit largement au fil des ans sous la pression des classes bourgeoises. Les procédures du remplacement était diverses. La plus simple consistait dans l’échange de numéro, de gré à gré, entre conscrits. Mais la plupart du temps, et surtout à partir du moment où, les levées devenant plus forte, le coût du remplacement s’éleva, il donnait lieu à un véritable contrat passé devant le notaire. Lorsque la somme versée était importante -et ce fut de plus en plus le cas à partir de 1808-, le remplaçant ne touchait qu’un acompte, le reste étant payé par échéance, voir en nature : les parents du remplaçant servant à l’armée percevez ainsi une sorte de rente, sous la forme de quintaux de blé, de seigle ou de maïs, de stères de bois, de fagots. Ces remplacements ne concerne cependant que 4% des conscrits et chute à partir de 1812 en raison des exigences financières des remplaçants qui dépasse largement les possibilités de la majorité de la France rural. À cette époque, le coût moyen d’un remplaçant atteignez les 6000 Fr ! Entre 1809 et 1813, on aura vu des contrats de 10 000 voire 12 000 Fr. Or, un fantassin de la ligne, comme l’était Martial, gagnait environ 110 Fr. par an !

Exemple de prix de l’époque : il faut en moyenne 900 Fr. pour acheter 1 ha de terres, 100 Fr. pour acquérir une vache, 50 à 60 Fr. pour un cochon, 10 Fr. pour un mouton ; une paire de chaussures vaut de 4 à 5 Fr., 1 l d’eau de vie 2 Fr., 1 kg de viande de 0,70 à 1 FR.

Je ne sais pas sous quelles conditions mon aïeul a accepté ce remplacement mais il serait intéressant d’aller faire un tour aux archives voir si j’y trouve un tel contrat !

Martial est donc affecté au 16è régiment d’infanterie, 4è bataillon, 1ère compagnie.

Uniforme des soldats des régiments d’infanterie

Etendard du 16è régiment d’infanterie

Arrivé au dépôt, il reçoit son fourniment (son équipement) et apprend, pendant une courte période, le maniement de son arme.

« CHARGEZ VOS ARMES ! »
A ce premier commandement, Martial prend son fusil flambant neuf, modèle 1777, dans la main gauche, et porte sa paume droite sur la platine à silex.
« OUVREZ LE BASSINET ! » Il découvre la pièce contenant la poudre d’amorçage, puis ouvre la giberne qui contient les cartouches.
« PRENEZ LA CARTOUCHE ! » : il tient à hauteur de la bouche, du côté opposé à celui de la balle, la cartouche prise dans la giberne.
« DECHIREZ LA CARTOUCHE ! » : avec les dents il arrache le bout de papier de la cartouche. Martial a vu des conscrits qui voulaient échapper à l’armée se faire arracher les incisives de la mâchoire supérieure…
« AMORCEZ ! » : Il verse précautionneusement un peu de poudre dans le bassinet.
« FERMEZ LE BASSINET ! » : il appuie sur la batterie et ferme le compartiment de la poudre d’amorçage.
« L’ARME A GAUCHE ! » Il tient le fusil à sa gauche, crosse en bas, le canon vers l’avant.
« CARTOUCHE DANS LE CANON ! » : il verse dans le canon ce qui reste de poudre de la cartouche, puis la balle et l’enveloppe de papier.
« TIREZ LA BAGUETTE ! » : il prend la tige d’acier contenue dans une rainure du fusil et l’introduis dans le canon.
« BOURREZ ! » : il pousse, à l’aide de la baguette, la poudre, et la balle au fond du canon.
« REMETTEZ LA BAGUETTE ! » : il retire la baguette du canon et la replace dans son logement.
« PORTEZ VOS ARMES ! » : Martial met son fusil à l’épaule, le canon vers l’avant .
Les fusils ainsi chargés, les soldats sont prêts à tirer : « APPRETEZ VOS ARMES ! », « EN JOUE ! », « FEU ! ». Une déflagration assourdissante et un nuage de fumée envahirent le terrain d’exercices.
Martial, les oreilles bourdonnantes, se demanda s’il aurait le temps d’exécuter tous ces mouvements dans l’ardeur de la bataille… Heureusement la baïonnette constituait une alternative salutaire !

La Grande Armée est d’abord une armée de fantassins, d’hommes qui combattent à pied. Ils sont un élément capital de la stratégie impériale. L’affrontement sur le terrain était précédé de marches et de contremarches, à un rythme effréné, qui surprenaient toujours l’ennemi, les hommes marchant en moyenne 40km par jour, et parfois jusqu’à 70 lors de déplacements stratégiques.

Dans la 16è d’infanterie de ligne, Martial participa à la Campagne d’Allemagne de 1813 qui se solda par la lourde défaite de Leipzig. Il fut blessé et transféré à l’hôpital le 05 novembre 1813. Toujours en convalescence, il est rayé des contrôles le 30 juin 1814.
(rayé des contrôles = il revient à la vie civile).

Bataille de Leipzig

Un an plus tard, le 30 mai 1815, il arrive au corps de la Compagnie d’ouvriers d’administration, organisée le 26 mai précédent. Pensant dans un premier temps qu’il s’agissait d’un corps non combattant, voici ce que j’ai pu trouver sur ces compagnies :
Par décret du 1er mai 1806, il fut formé dans la garde cinq compagnies d’ouvriers composées de boulangers, bouchers, fourrageurs, infirmiers, soldats du train. Sur sa fiche matricule, Martial est effectivement dit boucher. Cependant, c’est la seule fois où il est fait mention de cette profession. 

Martial aurait donc participé à la grande bataille de Waterloo qui se déroula en Belgique le 18 juin 1815. Cette fracassante défaite sera suivi de l’abdication définitive de Napoléon 1er et de son exil à Ste Hélène. Dès lors, Louis XVIII revient sur le trône de France. 

La bataille de Waterloo

Licencié de l’armée le 1er octobre 1815, Martial rentre chez lui, à Perpezac-Le-Noir. Quatre mois plus tard, le jeudi 1er février 1816, il épouse la jeune Françoise Chadapeaux, 16 ans. Ses parents sont cultivateurs, voisins et amis de la famille depuis longtemps, puisque Jean, le père de Martial, est témoins lors de la naissance de Françoise.

Martial devient papa pour la première fois le 25 septembre 1818 d’un petit Joseph. Trois ans plus tard, nait son second fils, Jean. Malheureusement, ce dernier décède à l’âge de 5 ans le 30 décembre 1826. Le couple a ensuite eu 3 petites Marie, en 1824, 1828 et 1830. Les deux premières sont décédées en 1834 ; l’une le 16 avril à l’âge de 9 ans et la seconde le 11 novembre, à 6 ans.

Le 24 septembre 1840, c’est un jour de fête au village de Bouillaguet. Martial, qui a assisté au mariage de son frère Jean 15 jours plus tôt, marie aujourd’hui son fils Joseph, âgé maintenant de 22 ans, à Anne Dussol, de Lagraulière. Le nouveau couple s’installe avec Martial et Françoise. Ils auront 6 enfants.

Le 27 juin 1850, c’est au tour de Marie d’épouser, à tout juste 20 ans, Grégoire Buge. L’année suivante, elle met au monde son premier enfant, une petite Françoise. Martial est alors grand-père pour la 6ème fois. Son fils Joseph a déjà eu 5 enfants : Anne, âgée de 10 ans, François 8 ans, Pierre 5 ans, Jean 1 an et Grégoire décédé à 2 mois. Trois autres suivront : Jean en 1853, Marie-Louise en 1861 et Marie-Antoinette en 1864. Les deux filles sont issues de son second mariage avec Jeanne Anglard. Marie-Louise est mon aïeule.

Marie, aura quand à elle au moins 5 autres enfants : 2 Jean, 2 Marie et une petite Marie-Françoise. Malheureusement, Martial n’aura pas le plaisir de les connaitre.

Il décède le 09 décembre 1852, à l’âge de 61 ans.
Sa femme, Françoise, décèdera à son tour deux ans plus tard. 

Sources :
Fiches matricules : site Mémoire des hommes
Livre : La Grande Armée de Jacques Demougin
Image d’uniforme des fusiliers : Bernard Coppens, du site www.1789-1815.com
Bataille de Leipzig : un peintre russe
Bataille de Waterloo : Clément-Auguste Andrieux
Drapeau du 16è RI : Par Centenier