Morts pour la France, du village d’Autouillet, dans les Yvelines.
Voilà une centaine d’années que l’on rend hommage à tous ces morts dans toute la France, en citant leur noms lors de la cérémonie du 11 novembre. Mais que savons-nous de leur vie ?

C’est parce que cette question revenait dans ma tête tous les ans le 11 novembre lorsque, les pieds glacés par la pluie, je me rendais avec mes enfants au monument aux morts de ma commune, que j’ai voulu retracer la vie de ces hommes.

Je n’ai aucun lien familiale avec eux mais leur destin, comme celui de tous ceux qui ont traversé cette terrible guerre, me boulverse. 

Voici donc pour mémoire, quelques informations sur la vie de ces hommes et de leur famille. 

Marcel, Adrien DUFOUR

Il avait 22 ans.
C’était un garçon d’ 1m74, châtain, aux yeux marrons, au visage allongé, et qui avait un grain de beauté à droite du menton.

Il était né à Autouillet, au 5 grande rue (actuelle route des Châteaux), le 25 février 1894. Son père Jules était commerçant, et marchand de vin. Sa mère s’appelait Henriette Leloir. Il avait une petite sœur, Georgette, de 5 ans de moins que lui. Ses parents ont divorcé en 1902, alors qu’il n’avait que 8 ans. Il a alors quitté Autouillet avec sa mère et sa sœur.

En 1914, Marcel avait 20 ans, et il vivait à Neuilly-sur-Seine où il exerçait le métier d’ajusteur (sa mission est d’ajuster des pièces mécaniques, de les parfaire en supprimant leurs défauts et de les  assembler pour obtenir un organe mécanique fonctionnel). Il était célibataire.

Pendant la guerre, il faisait partit du 69è régiment d’infanterie, 10è compagnie, matricule 304. Il y a obtenu le grade de caporal (c’est le chef direct du groupe de combat. C’est à lui que s’adressent les hommes de troupe pour les ordres et détails du service intérieur). Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914 Bataille des frontières ;
  • En 1915 Bataille des Flandres et Bataille de Champagne
  • En 1916 Bataille de Verdun et Bataille de la Somme

Il est mort lors de la bataille de la Somme, le 10 juillet 1916, à Maricourt. On lui a décerné la médaille de la Croix de guerre, à titre posthume (Médaille qui décorait les plus vaillants soldats sur les lieux même des combats).

Pendant la guerre, il faisait partit du 69è régiment d’infanterie, 10è compagnie, matricule 304. Il y a obtenu le grade de caporal (c’est le chef direct du groupe de combat. C’est à lui que s’adressent les hommes de troupe pour les ordres et détails du service intérieur). Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914 Bataille des frontières ;
  • En 1915 Bataille des Flandres et Bataille de Champagne
  • En 1916 Bataille de Verdun et Bataille de la Somme

Il est mort lors de la bataille de la Somme, le 10 juillet 1916, à Maricourt. On lui a décerné la médaille de la Croix de guerre, à titre posthume (Médaille qui décorait les plus vaillants soldats sur les lieux même des combats).

Marcel, Ernest FISSEAU

Il avait 28 ans.
C’était un homme d’ 1m72, châtain, aux yeux bleus.

Il était né à Paris (17è), le 04 février 1888. Son père Alexis, était garçon de recettes, avant de devenir cuisinier. Sa mère s’appelait Adèle Tronquet. Il avait une grande sœur, Marie-Louise, de 9 ans son ainée, et un frère, Edmond, de 7 ans plus âgé. Ce dernier s’était marié et installé avec sa femme à Autouillet, en 1911.

C’est probablement au cours d’une visite à son frère que Marcel a rencontré sa futur femme, Georgette Hoël, (la sœur de Georges, voir ci-dessous). Ils se sont mariés le 28 octobre 1913, et se sont installés à Bois Colombes où Marcel exerçait le métier de commis architecte. Leur petite fille, Yvonne est née un an plus tard, le 02 octobre 1914, à Autouillet.
Son père était déjà partit au front…

Pendant la guerre, Marcel portait le matricule 2966.
Il faisait partit du 46è régiment d’artillerie de campagne, où il était le deuxième canonnier servant, de la 3è compagnie (Canonnier servant : employé à la mise en œuvre de la pièce d’artillerie : manœuvres nécessaires à la mise en position, manutention des obus sur la position, évacuation des douilles d’obus tirés, etc.). Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914 Bataille de la Marne et Bataille de l’Yser
  • En 1916 Bataille de Verdun

Le 27 mars 1916, la 3è batterie, commandée par le lieutenant Vennin, résiste avec la plus rare ténacité à un bombardement formidable, comme jamais le régiment n’en avait encore vu. (cf JMO du 46è RAC)
C’est lors de ce bombardement que Marcel est mort, à Bois Bourrus, d’un éclat d’obus. Il est inhumé à Germonville, en Meurthe-et-Moselle.

Léon, Alexandre GUÉRAND

Il avait 43 ans.
Il était jardinier. C’était un petit homme d’ 1m54, aux cheveux châtains et aux yeux bleus-gris. Il était né à Neauphle-le-Château, le 25 septembre 1873. Son père Alexandre, était jardinier lui aussi. Sa mère s’appelait Marie-Virginie Pinet. Le couple s’était installé à Autouillet entre 1876 et 1880. Ils avaient alors 3 enfants, et en ont eu 5 de plus qui sont nés à Autouillet. Ils vivaient au 8 Grande rue.

Léon avait 27 ans lorsqu’il a épousé Marie-Louise Wolfer, le 24 décembre 1900, à Paris. Le couple s’est installé à Sèvres, où ils ont eu deux enfants : Marcel en 1901, et Lucie en 1902. 

Pendant la guerre, il faisait partit du 29 régiment d’infanterie territoriale (30-45 ans), 1er bataillon, 3è compagnie, où il était soldat de 2è classe. Il portait le matricule 3473. Les R.I.T ne devaient pas être en première ligne mais vu les pertes importantes, ils se trouvèrent vite engagés dans la bataille.

  • De 1914 à 1915, son bataillon était au camp retranché de Paris.
  • Puis il est partit pour la Meuse le 1er juin 1915 : Clermont-en-Argonne, forêt de Hesse, tranchées de Vauquois.
  • Fin février 1916, le 1er bataillon se trouvait à Parois, en forêt de Hesse. C’est là que Léon fut blessé sur le champ de bataille. Il fut transporté à l’ambulance (hôpital de campagne), au château de Salvange, où il décéda de ses blessures le 22 mars.

 

Il est enterré dans la nécropole nationale « Les Islettes », près de Clermont-en-Argonne (dans la Meuse), tombe n°477.
Sa veuve, Marie-Louise, est repartit vivre près de sa famille à Epfig, en Alsace, où elle est décédée en 1918, à l’âge de 43 ans.

Georges HOËL

Il avait 26 ans.
C’était un homme d’ 1m67, aux cheveux et aux yeux châtains. 

Il était né à Autouillet, le 08 avril 1888.  Son père Henri était berger. Sa mère s’appelait Maria Frère. Ils étaient cultivateurs à Autouillet, au 15 grande rue (actuelle route des Châteaux).

Le 18 avril 1912, Georges alors cultivateur, a épousé une fille du village, Fernande Meillier. Le 14 juin de l’année d’après, sa femme a mise au monde leur petite fille, Simone.

Pendant la guerre, Georges était soldat au 104è régiment d’infanterie, et portait le matricule 4082.

Il a été porté disparu le 22 août 1914, lors d’une des premières batailles de cette guerre, la bataille des frontières, à Ethe, en Belgique.
Son corps n’a pas été retrouvé tout de suite car, en 1920, il y a eu un jugement du tribunal pour déclarer son décès définitif. Pourtant, nous savons aujourd’hui qu’il est inhumé dans le cimetière militaire de Ethe-Laclaireau (Belgique), tombe n°214.
Son corps a dû être retrouvé après 1920 : aujourd’hui encore, des scientifiques travaillent pour redonner leur identité aux squelettes non identifiés sur le champ de bataille.
Selon l’état civil, Georges serait le père d’une autre petit fille, Andrée. Cependant, cette enfant est née en 1919…

Léon LETELLIER

Il avait 19 ans. Il était né à Evreux le 31 décembre 1898, dans une voiture !

Son père Ernest était vannier. Sa mère s’appelait Louise Hanquinquant.
A 3 ans, Léon a perdu son papa. Sa mère s’est alors installée à Autouillet avec son nouveau compagnon, et ils s’y sont mariés en 1916. C’est pour cela que son nom figure sur le monument aux morts d’Autouillet.

Pendant la guerre il était soldat de 2è classe dans le 24è régiment d’infanterie, et portait le matricule 2320. Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914 Bataille de Charleroi (Belgique) et Bataille de la Marne
  • En 1915, l’offensive d’Artois
  • En 1916, Bataille de Verdun
  • En 1917, le chemin des Dames (Aisne)
  • En 1918, la bataille de Picardie.

Le 21 octobre 1918, il a été tué à Sissonne (Aisne).
Il est inhumé à la nécropole nationale ‘Pontavert’, (dans l’Aisne), tombe n°34.

Albert LONGCÔTÉ

Il avait 21 ans, et il était maçon dans l’entreprise Guerval, à Thoiry (voisin d’Autouillet).

C’était un homme d’ 1m71, aux cheveux châtains et aux yeux bleus, le teint coloré, le visage rond, une petite bouche et des lèvres fines. Il était né à Autouillet le 24/03/1893, au Val Cornu. Son père Célestin, était journalier agricole. Sa mère s’appelait Blanche Bouquet, et elle était nourrice. Il était l’aîné de 7 enfants.

Pendant la guerre il était soldat au 102 régiment d’infanterie, 3è bataillon, 12è compagnie. Il portait le matricule 1549.
Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • Bataille de Mangiennes, Ethe, Bataille de la Marne, Puisaleine, Quennevièvres et Bataille de Picardie.

Le 31 octobre 1914, Albert meurt, à l’hôpital temporaire n°24 à Mayenne, des suites de ses blessures.
Il est inhumé dans le cimetière d’Autouillet (tombe le long du mur de gauche quand on entre).

Marcel LONGCÔTÉ

Il avait 21 ans.
Comme son frère Albert, Marcel était maçon. C’était un homme d’ 1m70, aux cheveux châtains et aux yeux bleus foncés. Il avait une cicatrice du côté gauche du cou, et une fossette au menton. Il était né à Autouillet, le 04 novembre 1894, 15 mois après son frère Albert. C’était le second de la fratrie.

Pendant la guerre il faisait partit du 3è régiment de zouaves et portait le matricule 343. Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914, Bataille de Charleroi, Bataille de la Marne et Bataille de l’Oise.
  • en 1915, Bataille de Champagne
  • En 1916, Bataille de Verdun

Le 06 mars 1916, Marcel meurt à l’hôpital de Saint Dizier, des suites de ses blessures. Il est inhumé lui aussi dans le cimetière d’Autouillet, dans la même tombe que son frère.

Louis, Eugène MILLERET

Il avait 33 ans.
C’était un homme d’ 1m62, aux cheveux châtains et aux yeux roux.  Il était né à Auteuil, le 24 décembre 1883. Son père Louis était tuilier. Sa mère s’appelait Louise Fouconneaux . 

Le 21 février 1914, il a épousé Anne Antoinette DESSUISE à Autouillet. Ils ne semblent pas avoir eu d’enfants. Il était cultivateur avec son père, au 1 impasse du Château.

Pendant la guerre il était soldat de 1ère classe au 21è régiment d’infanterie coloniale, 6è compagnie. Il portait le matricule 3585. Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914, Bataille des frontières en Belgique, et Bataille de la Marne
  • En 1915, Bataille de Champagne, à Beauséjour puis à la Main-de-Massiges.
  • En 1916, Bataille de la Somme
  • En 1917, Bataille de la Somme et de l’Oise

Il a été blessé au pouce droit, le 1er juillet 1916 à Dompierre. A cette occasion, il fût cité à l’ordre du régiment :

« Soldat infatigable, d’un dévouement au-dessus de tout éloge ». Croix de guerre avec étoile de bronze. 

Le 29 juillet 1917, il est mort à Chermizy-Ailles, dans l’Aisne, sur le champ de bataille.

Lucien REDAUX 

Il avait 36 ans.
C’était un homme d’ 1m67, aux cheveux châtains foncés et aux yeux marrons.  Il était né à 21 avril 1881 à Autouillet.
Son père Henri était fermier. Sa mère s’appelait Ernestine Maillier. En 1902 lors son service militaire fût ajourné pour « faiblesse ». En 1914, il vivait à Paris où il était ingénieur agronome.

Pendant la guerre il a d’abord était envoyé au 115è RI, puis il est passé au 130è RI en août 1915, et enfin au 294è RI, le 05 décembre 1915. Il a été nommé Caporal fourrier le 1er février 1916.
(Le fourrier tenait toutes les écritures de la compagnie, à l’exception des punitions et du livret ordinaire).

Avec son régiment, il a participé aux batailles suivantes :

  • En 1914, à Verdun, Montagny et dans la Somme
  • En 1915, Bataille de Champagne, et Bataille de Verdun
  • En août 1915, avec le 130è RI : Bataille en Champagne
  • En 1916, Bataille en Champagne et dans la Somme
  • En 1917, préparation de l’offensive dans l’Aisne, aux tranchées du Panthéon.

Il a été porté disparu le 26 mai 1917, à la ferme du Panthéon, près d’Aizy, et déclaré mort en 1920. Son nom apparait sur une plaque commémorative du Crédit Foncier de France, à Paris (1er).

Ce sont les 9 hommes qui figurent sur le monument aux morts d’Autouillet, pour la 1ère guerre mondiale.

Deux autres noms figurent également sur le monument aux morts : celui de Marcel Fagnière, mort pour la France pendant la seconde guerre mondiale, et Pierre Kuhn, mort pour la France lors de la guerre d’Algérie.

Les évènements étant plus récents, il est plus difficile d’avoir des informations, mais voici ce que je sais sur eux :

Marcel FAGNERE

Il avait 37 ans, il était manœuvre (ouvrier de chantier). Il était né à Vienne-Le-Château (Marne) le 13 juillet 1907. Son père, Aimé, était ouvrier bonnetier. Sa mère s’appelait Marie-Jeanne Mayer et était elle aussi était ouvrière bonnetière . 

Le 07 décembre 1929 il a épousé à Paris Suzanne Dubois, originaire d’Autouillet.  Le 17 février 1931, sa femme a mise au monde à Paris leur petite fille, Solange.

Pendant la seconde guerre mondiale, Marcel faisait partit du 139è régiment d’infanterie de forteresse dont la devise était : « La victoire ou la mort ».

De septembre 1939 à mai 1940, son régiment était occupé à des travaux de fortification sur le sous-secteur fortifié de Morfontaine. Le 16 mars 1940, dans le cadre de la réorganisation de La Défense des frontières, le secteur fortifié de la Crusnes a été dissous et ses éléments organiques ont été rattachés au 42° Corps d’Armée de Forteresse (CAF). Le secteur tenu par le régiment n’a pas connu de réel assaut de la part des allemands.
Le 13 juin, le régiment s’est replié vers Toul avec le groupement Fleurian, en laissant les équipages d’ouvrage sur place et il fût fait prisonnier en Meurthe et Moselle les 21 & 22 juin 1940, après que le drapeau ait été brûlé.

Le 30 décembre 1944, Marcel est mort à Siersalm, en Allemagne, d’une blessure à la tête.

Pierre, Raoul KUHN

Il avait 31 ans. Il était né le 30 mai 1927, à Saint Julien les Metz, dans la Moselle. Ses parents étaient Gustave, Othon, Edouard, Joseph, Ferdinand Kuhn, et Madeleine Auburtin.
Le 19 janvier 1952, il a épousé Germaine Thébault, originaire d’Autouillet. Il était à ce moment là Brigadier Chef des Troupes Coloniales, et vivait à la Caserne de Clignancourt, dans le 18è arrondissement de Paris.
Il est décédé le 16 juillet 1958 à Alger, pendant la guerre d’Algérie (1954-1962).

Ce sont les seules informations que j’ai pu glaner sur lui pour l’instant. Il existe un dossier individuel le concernant, au Service Historique de la Défense, à Caen (AC 21 P 225655) pour ceux qui seraient interessés.
A suivre donc…